Un 4x4 blanc, Un guide et un conducteur cashmiris, un chasseur d'images australien qui parcourt le monde depuis 30 ans, une jeune suédoise qui a courageusement choisi l'Inde comme premier pays, un bûcheron canadien, voyageur infatigable et un petit varois parti faire le tour du monde il y a plus de trois mois. Une équipe ecclectique et 10 jours de vie commune dans le futur proche.
Nous quittons Shimla pour une longue journée de jeep et les discussions vont bon train dans l'espace clos du véhicule. On apprend à se connaître. La diversité des cultures nous enrichit.
La route sinueuse s'élève dans une vallée naissante tandis que le manteau brumeux glisse sur les collines et enveloppe la nature silencieuse. Nous nous arrêtons pour une balade en forêt achevée par un temple hindou au sommet de la colline. Aucune vue enivrante. De vilains nuages tissent une épaisse barrière. A peine un banc pour souffler et partager une tablette de chocolat.

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Nous repartons et les discussions continuent. Rires. Expériences de voyage. Conseils sur des destinations futures. Le sentiment frustrant d'une parcelle du monde inconnue. On l'évoque, on utilise quelques superlatifs, on fait rêver son auditoire et ce nom qui était parfaitement absent de mon esprit s'ajoute à la liste des lieux à voir. Plus on voyage et plus il reste à voyager. Un cercle sans fin, le voyage vous fait et vous défait. Sur les routes cahoteuses indiennes, nous traitons des ours et de la pêche des saumons dans les rivières de l'Alaska. La visite du temple d'Hanuman nous extirpe de la jeep. Une statue disneylandesque de l'homme-singe invite les véhicules à s'arrêter et à se recueillir quelques instants.

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Nous arrivons à Sarahan où les toits du temple noircis par la pénombre présagent d'une belle visite demain matin. Nous nous asseyons dans un petit restaurant. La peinture craquelée, des tables de cantine, des casseroles cabossées. Une famille népalaise tient la boutique et dans cette pièce unique de 10m², le réconfort d'un repas familial, on se sent chez soi.

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Réveil agité. Pas le temps de traîner, nous partons à la chasse aux larges araignées qui ont investi les lieux, un seau et une bassine comme armes. Nous avalons un petit déjeuner copieux où on relate nos exploits matinaux puis partons visiter le temple. D'exquis frontons de bois sculptés, une cérémonie hindoue, et un tikka carmin sur le front.

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Nous prolongeons notre visite aux alentours du village. Il est l'heure de partir.
Sur le bord de la route, une vache se bat avec un récipient en plastique accroché à sa tête.
La vallée s'enfonce.
La route vertigineuse creusée dans la falaise à des centaines de mètres du sol s'anime lorsque deux camions bariolés de couleurs vives se croisent. Les rétroviseurs extérieurs s'entrechoquent. La marche arrière est parfois la seule solution. La jeep patiente près du vide avant de reprendre ses virages serrés, le klaxon enfoncé pour avertir les autres véhicules. Une route dangereusement haute qui apporte des sensations fortes aux passagers longeant le précipice. Une vallée aux dimensions de l'Himalaya. Des routes saignent la colline que des glissements de terrain annihilent en quelques secondes.
Des mois de travail pour recompléter les portions disparues.
Une activité insoupçonnée anime notre route aérienne : un troupeau de moutons crée un embouteillage ou un baba sadhou offre des sucreries aux conducteurs et aux passagers fatigués.

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Nous passons 2 nuits à Sangla où un temple en bois domine le village. Il faut enlever les chaussures, revêtir un chapeau et nouer une ceinture pour pénétrer dans le vieux monument.
Ruelles maladroites, vergers et parterres de fleurs pourpre et azur.
Les pommiers croulent sous le poids des fruits rouges.
Au coeur du village, des maisons de pierres nues ou blanchies à la chaux renferment quelques âmes bouddhistes tibétaines en exil.

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La visite de Sangla est entrecoupée par une excursion au village de Chitkul, le dernier village indien avant la frontière tibétaine. L'hiver, les chutes de neige peuvent couper l'accès au village. Ce dernier vit alors en autarcie, oublié de la lointaine civilisation.
Froid saisissant, loin de la fournaise du bassin de Delhi.

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Omelette à la tomate, toasts à la confiture insipide et thé noir. En route pour Kalpa. Sacs entassés à l'arrière, quelques manoeuvres pour quitter l'allée étroite de la guesthouse, on reprend la route.
La bande asphaltée reprend sa danse virevoltante dans la falaise blessée. La rivière en contrebas est un simple cours d'eau. Une sensation de vertige me saisit en jaugeant le ruban bleu turquoise de la vallée. Le ballet des camions décorés nous terrifie, chaque virage est une épreuve. Nous discutons pour oublier le vide. Quelques arrêts pour prendre des photos.
Le panneau "Kalpa" annonce la fin de l'étape. Ici, la marijuana pousse comme de la mauvaise herbe. Et les pommiers plient sous leur cargaison. En fond, la pointe du Kinnaur Kailash fait de timides apparitions entre les nuages. Par beau temps, il s'éclaire de 7 couleurs différentes au cours de la journée. Kalpa, un village de plus accroché aux pentes d'une colline qui vit des heures difficiles quand les vents de l'hiver balaye la région.

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Un nouveau jour, la route continue à s'élever. Nature aride, nature inhospitalière. Des buissons décharnés sourdent ça et là.
La patte humaine a encoché quelques bâtisses délabrées et insignifiantes dans l'ogre de terre. La route zigzague sur les pentes raides et meurt à l'entrée de Nako. Dans le ressac des collines, un petit lac absorbe quelques âmes qui se sont regroupés pour mieux lutter. Le décor himalayen comme seul réconfort de cette vie rude. Pour nous touristes, nous nous gorgeons de ces impressions, de ces sourires, de ces pierres coiffées par les vents, de ces coulées de terre, de ces drapeaux aux franges usées frémissant au sommet d'un talus, de ces habitations cubiques et imparfaites. Où est passée la folie des villes indiennes ? Les klaxons des rickshaws et la pauvreté errante sur les trottoirs ? Difficile de croire qu'on est toujours en Inde. Mais c'est cette diversité qui attire quantité de touristes, loin des sentiers rebattus.
Un trajet en train et l'extase d'un bout de verdure chasse la dépression et le mal-être d'une ville bouillonnante. On se sent bien ici.

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