paroles du bout du monde

Aller au contenu | Aller au menu | Aller à la recherche

Keyword - steppes mongoles -

Fil des billets

samedi 14 juillet 2007

aventures dans la nature mongole (3e partie)

Si vous avez manqué le début, cliquez ici pour lire la première partie ou ici pour la deuxième partie du trek...

Au commencement de mon sixième jour de marche, mon rythme devient plus lent et je souffre de mes ampoules. En fin de matinée, je suis accosté par un jeune mongol qui fanfaronne sur son cheval tandis que je traîne mes pieds douloureux. Il représentera le seul véritable désagrément au cours de ce périple. Il se met en travers de mon chemin et m'empêche d'avancer, essaie d'ouvrir mon sac et saisit la longe de mon cheval. Le ton commence à monter jusqu'à ce qu'on rejoigne un troupeau de chèvres gardé par un de ces frères. Ce dernier est visiblement amusé de me voir dans l'embarras. Je lui propose finalement de faire marche arrière et d'aller boire un verre dans sa yourte. A notre arrivée, son comportement change radicalement. Sa famille et principalement son père sont adorables et heureux de partager un peu de leur temps et de leurs traditions avec un étranger.

IMG_1336.JPG
IMG_1348.JPG
La situation s'est apaisée lorsque je repars, ayant hâte malgré tout de m'éloigner pour oublier cette épisode. Mais avant d'attaquer la montée de la colline qui me fait face, j'entends le jeune fanfaron arriver au galop suivi d'un autre de ses frères, cette fois, il est question d'acheter mon cheval. Son grand frère, plus posé, comprend que je ne vendrai pas mon cheval et raisonne son petit frère. Je quitte enfin les lieux et marche un long moment pour camper le plus loin possible.

IMG_1399.JPG
Le lendemain midi, alors que j'avance à flanc de montagne, le spectre de la veille revient lorsque j'aperçois deux jeunes cavaliers s'approcher. Mais ces deux là sont animés de la gentillesse qui caractérise l'hospitalité légendaire des mongols.

IMG_1401.JPG
Je souffre et c'est avec plaisir que je m'arrête dans l'habitation voisine. En échange des traditionnelles photos, la famille m'invite à manger et à me reposer.

IMG_1403.JPG
IMG_1405.JPG
IMG_1430.JPG
En fin de compte, je resterai jusqu'au lendemain matin. Je partage la finale de lutte du Naadam retransmise à la télévision. Peut-être l'évènement sportif majeur de l'année en Mongolie. Malgré l'éloignement, chaque yourte ou maison en bois est équipée d'une énorme parabole qui repose sur le sol. L'électricité est fournie par des batteries tampon, elles-mêmes rechargées par un panneau solaire, une éolienne ou un groupe électrogène. L'anachronisme du panneau solaire posé sur la toile blanche de la yourte est fabuleux. J'offre ma canne à pêche que je n'ai pas utilisé. On improvise un cours de lancer dans les steppes. Chaque membre de la famille que je connais depuis quelques heures à peine m'a adopté et est aux petits soins comme si je faisais partie des leurs.
Au petit matin, après les avoir remercié chaleureusement de leur accueil, je plie mes affaires et m'enfonce le long de la rivière.
Le chemin est de plus en plus difficile et la pluie complique mon avancée, je n'ai d'autres choix que de marcher dans la rivière à certaines reprises. Le cheval glisse sur les pierres qui habillent la rive. C'est ici près d'un pré verdoyant et difficile d'accès que je lui enlève son licol et sa longe. Je libère mon compagnon. Je souhaite qu'il goûte quelques jours de liberté avant d'être certainement capturé. Je disparais dans le pierrier qui se dresse face à la rivière. La marche est pénible dan cette zone vierge de traces humaines.

IMG_1444.JPG
IMG_1445.JPG
Après plusieurs heures, j'entame la descente sur l'autre versant de la colline et j'atteins un petite rivière affluent de l'Ider Gol où je me pose épuisé. Plusieurs mongols m'abordent et voyant mon état de fatigue, m'invite chez eux. L'ambiance est très chaleureuse et détendue et c'est ici que je décide de terminer mon trek.

IMG_1474.JPG
IMG_1446.JPG
IMG_1465.JPG
IMG_1468.JPG
IMG_1473.JPG
Je fais des démonstrations des différents équipements que je porte dans mon sac devant l'oeil admiratif d'une dizaine de mongols. Je me sens bien ici et en échange de leur repas, je leur cuisine un de mes repas lyophilisés à ma façon, avec l'eau chauffée au réchaud. Et 2 d'entre eux partagent un "riz et poisson à la provençale" qu'ils trouvent délicieux.

IMG_1485.JPG
IMG_1472.JPG
IMG_1482.JPG
IMG_1489.JPG
IMG_1500.JPG
Le lendemain matin, je pars en moto vers Tomorboulag avant de prendre une jeep qui me mène à Möron. Saviez-vous qu'on peut rentrer à 15 dans une jeep ?

IMG_1510.JPG
IMG_1509.JPG
IMG_1508.JPG
Malgré la difficulté physique, la sous-alimentation et la solitude, cette aventure m'aura démontré que des valeurs telles que l'entraide, l'hospitalité et le plaisir du partage sont essentielles voire vitales. Les difficultés de communication et les différences de culture n'ont pas égratigné le bonheur vécu avec ces familles des steppes. Mon coeur gardera pour longtemps ces sourires et cette joie de vivre.

mardi 10 juillet 2007

aventures dans la nature mongole (2e partie)

Si vous avez manqué le début, cliquez ici pour lire la première partie du trek...

Je démonte ma tente, je boucle mon sac, je détache Minimor (c'est le nom que j'ai donné à mon cheval) et je me mets en route vers une contrée inconnue fait de grands espaces où l'homme ne semble pas avoir d'emprise. Je grimpe le monticule sur ma gauche et je compare le relief avec celui dessiné sur ma carte. Ma seule nécessité sera de trouver de l'eau pendant ces prochains jours. Je descends la colline et prends un cap au nord. La lande verte invite à la marche et ouvre l'appétit de mon cheval. Le terrain est plat, vaste quelquefois façonné par un ruisseau dont les eaux courent vers le lac. Un ruisseau m'oblige à me déchausser et un gentil mongol m'aide à traverser.

IMG_1217.JPG
Au détour d'une colline qui contrarie la platitude des lieux, la steppe s'enfonce sur une dizaine de kilomètres. De nombreux animaux paissent. Chaque famille possède ses troupeaux de moutons, chèvres, yacks et chevaux qui évoluent librement sur ces patûrages. Le tapis vert qui se déroule sous mes pieds semble sans fin et chacun de mes pas rompt la sérennité d'innombrables sauterelles.

IMG_1223.JPG
IMG_1225.JPG
IMG_1241.JPG
Sur ma gauche, une rivière entrouvre la prairie et sera ma source d'eau pour les 2 prochains jours. Ce n'est qu'en fin de journée que la steppe meurt sur les contreforts d'une colline coiffée d'un petit bois qui m'abritera pour la nuit.

IMG_1244.JPG
La suite du parcours s'élève en pente douce dans la colline, avant de redescendre dans la vallée. Je suis le cours d'eau bordé d'arbustes dans ce scénario plus accidenté que la veille. En fond de vallée, le terrain est à moitié marécageux, je reçois des encouragement de motards et 4x4 mongols qui restent perplexes sur les rôles de chacun dans notre duo. Le cheval semble bien à son aise pendant que je croule sous le poids. J'aperçois quelques enfants qui drivent leur chevaux avec une facilité déconcertante. Tout comme leurs compères motorisés, ils sont intrigués par cet étrange duo.

IMG_1266.JPG
La rivière dessine de superbes décors qui feraient le bonheur de nombreux campings.

IMG_1248.JPG
IMG_1258.JPG
J'opte pour une petite clairière sur la rive droite. Le glissement de l'eau me réconforte. Avant la tombée de la nuit je reçois la visite d'une bande de potes venus partager une bouteille de vodka près de la rivière. L'un d'entre eux est un lutteur qui va participer au festival du Naadam les 11 et 12 juillet qui correspond à la fête nationale mongole.

IMG_1282.JPG
IMG_1291.JPG
Il me menace gentiment de me jeter dans la rivière si je ne bois pas plusieurs gorgées cul sec. Je trempe les lèvres et grimace. Devant ma mine, sa petit amie empoigne la bouteille et s'enfile quelques rasades de vodka. Lorsque la bouteille est terminée, la joyeuse équipe enfourche les motos et disparait dans la pénombre.

IMG_1293.JPG
IMG_1304.JPG
Au troisième jour, je croise le village de Jagarlant qui signe le commencement de ma marche le long de la rivière principale Ider gol. Je fais l'erreur de traverser la rivière sans me déchausser et de continuer à marcher les pieds mouillés pendant plusieurs heures, rien de tel pour avoir des ampoules. A chacun de mes arrêts, je me délecte de voir le cheval brouter goulûment l'herbe grasse que nous foulons. Le soir, chacun son repas, herbe verte pour le quadrupède et lyophilisé pour moi.

IMG_1308.JPG
A partir du quatrième jour les collines qui jalonnent la rivière deviennent de plus en plus pelées et monotones, seules deux bandes vertes délimitent les méandres de la rivière.

IMG_1312.JPG
IMG_1314.JPG
Un peu fatigué et pensant mieux connaître mon cheval, je tente de le chevaucher avec mon sac sur les épaules. Il ne veut rien savoir et prend la fuite. Un cavalier mongol me le ramène et je tire la conclusion que ce cheval ne sera rien d'autre qu'un compagnon pendant cette marche, ce qui est déjà une très belle expértience. Le soir, je m'arrête pour la première fois dans une habitation mongole. En échange de leur hospitalité composé de thé salé à base de lait de yack et de fromage de chèvre extra dur, je prends une série de photos. Certains revêtent leurs plus beaux habits pour la cérémonie.

IMG_1319.JPG
Juste avant la tombée de la nuit je repars, refusant leur offre de rester pour la nuit et prétextant que la route est encore longue. Avant de monter la tente, une moto s'arrête et malgré la difficulté pour communiquer, l'un des motards m'explique qu'il se souvient de moi, qu'il m'a vu passer il y a quelques jours près du lac blanc avec mon cheval et mon imposant sac à dos. Difficile de passer inaperçu !

IMG_1329.JPG
Ma marche continue le long de la rivière. Je décide d'abandonner la selle derrière un rocher et reprends ma lente avancée vers l'est. A l'endroit où je plante le camp, des takhis (chevaux de Przewalski) s'abreuvent. J'ai rompu leur tranquilité et ils disparaissent derrière le monticule à la recherche d'une nature plus sereine.

IMG_1332.JPG

Pour lire la suite du récit, cliquez ici ...

vendredi 6 juillet 2007

aventures dans la nature mongole (1ere partie)

Au petit matin je quitte Fairfield Guesthouse pour me rendre sur la place du marché qui est également le point de départ vers le lac blanc (Terhyin tsaagan nuur) à environ 150km à l'ouest. L'activité principale du marché est la vente de peaux et de laine de mouton. Au milieu de cette activité lucrative, j'aborde un mongol en lui disant "Tariat" (nom du village le plus proche du lac), ce dernier m'accompagne vers un chauffeur qui part pour cette destination mais qu'à 18h. Je fais finalement affaire avec le suivant qui part à 13h. Il n'est pas vraiment spécialisé dans le transport de personnes mais plutôt dans les déménagements , mais pour 10€ la course, Il me réserve sa meilleure place. On essaie d'engager la conversation et je lui fais part de mon souhait d'acheter un cheval. La nouvelle semble vite se répandre quand un mongol m'accoste et me tend un téléphone. A l'autre bout du fil, il s'agit de Tunga, seul professeur d'anglais de la province. Elle possède un camp de yourtes près du lac et peut m'aider à trouver un cheval. Voilà qui s'appelle avoir de la chance. Rendez-vous est pris le soir à Tariat.
Lorsque le minivan 4x4 est plein, on quitte Tsetserleg. L'allure est soutenue et les seuls arrêts sont mis à profit pour rajouter de l'eau dans le radiateur ou pour se recuellir près d'un arbre étrangement décoré. En respect des croyances chamanistes, on fait trois fois le tour de l'arbre, puis le temps est au partage d'une bouteille d'airag, lait de jument fermentée. Sans oublier l'offrande des dernières gouttes pour l'arbre sacré.

IMG_1053.JPG
IMG_1069.JPG
IMG_1075.JPG
IMG_1040.JPG
IMG_1080.JPG
IMG_1091.JPG
IMG_1104.JPG
En fin d'après-midi, après avoir livré les différents meubles, nous arrivons à Tariat. Tunga m'accueille chaleureusement et m'héberge pour la nuit. Son camp de yourtes qui se nomme white lake guesthouse se trouve à 12km du village et on ne s'y rendra que le lendemain matin.
Le lendemain matin, accompagnés de son mari et de sa fille nous partons pour le lac. Son mari est un mongol hors du commun puisque son antipathie n'a d'égal que l'absence d'expressions positives et joviales de son visage. Tunga fait l'interprète et sur le chemin nous abordons le sujet de l'achat du cheval. Son mari reste inflexible sur le prix qu'il a fixé à 400000 Tögrögs (260€), sachant que le prix moyen se situe entre 2000000 à 250000 T. il me vante les mérites de ces chevaux, à l'écouter, il élève les meilleurs chevaux de Mongolie, et chacun d'entre eux pourrait remporter le grand prix d'Amérique ! Arrivé au camp, j'en profite pour me plonger dans le livre d'Emile Brager "techniques du voyage à cheval" qui dispense de précieux conseils. Mais, il faut se rendre à l'évidence, ce n'est pas après quelques pages feuilletées qu'on peut se proclamer spécialiste chevalin. Je procède à quelques essais et rétorque que le prix est toujours trop élevé. Il m'amène un cheval d'une yourte voisine, moins cher mais semble-t-il moins docile. En parallèle, je teste le reste mon matériel, du réchaud au filtre à eau. Je passe pas mal de temps à cogiter sur l'achat de ce cheval, et malgré son prix, je me décide à le prendre et je compte commencer mon périple le lendemain.

IMG_1149.JPG
Mais le lendemain, Les chevaux de monsieur ne sont plus à vendre, il ne veut plus rien savoir. Il dit être attaché à ces chevaux. C'est à espérer qu'il ait plus de sympathie avec les animaux qu'avec ses semblables humains. Agacé par ce revirement de situation, j'achète finalement le cheval de la yourte voisine qui m'avait moyennement convaincu la veille. Le propriétaire arrime solidement mon sac à dos sur le dos du cheval et je déguerpis au plus vite pour chasser l'agacement qui m'habite.

IMG_1132.JPG
IMG_1133.JPG
IMG_1135.JPG
IMG_1163.JPG
IMG_1174.JPG
Mon plan est de longer la rive sud du lac puis de marcher vers le nord jusqu'à un petit village, Jagarlant, puis de suivre l'Ider Gol, rivière qui forme un arc jusqu'à Möron, chef-lieu de la province du Khövsgöl. Je me mets petit à petit en jambe, et mes idées noires matinales commencent à se disperser. Au fur et à mesure de mes pas, j'apprends à connaître mon nouveau compagnon que je tiens au bout d'une corde. Je me retourne souvent, je capte les différents signes extérieurs de son comportement et tente de les analyser. Se balader à côté de cet animal massif procure une sensation particulière.
J'avance sur les larges langues vertes qui dessinent le contour du lac lorsque j'entends un craquement. Je me retourne brusquement, le cheval s'agite et je vois mon sac tomber de son dos, la sangle a cassé. Je ne peux retenir la puissance de l'animal et lâche la longe. Impuissamment, j'assiste à la scène. Le cheval accèlere, appeuré par cette charge qu'il traîne. Mais après plusieurs mètres, le lien qui unissait mon sac au cheval se rompt à nouveau et le cheval s'éloigne. Une large entaille dans le sac poussiéreux témoigne de cet incident. Je charge ce dernier sur mes épaules et part récupérer mon cheval dans le sens opposé de ma marche. Mais impossible d'approcher l'animal. Deux jeunes mongoles réussissent à s'emparer de l'animal et me le ramène. Mon sentiment est confus à ce moment, il est hors de question de recharger le sac sur le dos du cheval et je n'avais pas prévu l'option de porter le sac. Je n'ai fait aucun tri, ce qui fait 25kg sur les épaules. Cependant, je n'ai pas d'autre option que de le porter et me remettre de cet évènement.
Un peu plus loin, j'attache le cheval autour d'un poteau électrique et lorsque je décharge mon sac de mes épaules, d'un violent mouvement arrière, le cheval se libère à nouveau. Un papy mongol le capture et me tend la corde à une centaine de mètres de là. C'en est trop pour aujourd'hui, je pense faire marche arrière et rendre le cheval à son propriétaire. Je décide finalement de m'installer dans les hauteurs du lac près d'un bois.
J'attache le cheval autour d'un arbre avec une corde plus solide cette fois et installe ma tente à quelques mètres de là. J'ai un gros coup de blues, j'ai envie de libérer le cheval prendre un transport en commun et m'éloigner de ce maudit lieu.
Le lendemain, la nuit a porté conseil, je décide de rester toute la journée dans ce lieu, pour me réconforter moralement et tenter d'apprivoiser l'animal. Je chasse les pensées négatives et le blues de la veille. Les règles du jeu ont changé et je dois désormais porter le sac mais demain je partirai vers le nord avec mon compagnon capricieux.

IMG_1195.JPG
IMG_1208.JPG
IMG_1215.JPG

Pour lire la suite du récit, cliquez ici ...